La « japonisation » de l’économie européenne requiert de nouvelles approches en matière de gestion assurantielle
Par Alexandre Piazza, Responsable de la gestion assurantielle dédiée à la clientèle externe chez Groupama Asset Management.
La comparaison a été faite de nombreuses fois : l’environnement macroéconomique de la Zone Euro ressemble de plus en plus à celui observé au Japon ces trente dernières années, entre taux d’intérêt durablement bas, faible niveau d’inflation, endettement significatif et, enfin, lacunes dans la cohésion entre politiques budgétaire et monétaire. Ces similarités entre les deux régions permettent aisément l’analogie d’une « japonisation » de l’économie européenne.
Un scénario qu’il faut cependant nuancer, puisqu’à ce stade le potentiel de croissance nominale de la zone euro demeure orienté à la hausse et la stabilité de la population active est soutenue par le dynamisme des flux migratoires, ce qui n’était pas le cas au Japon. Quoi qu’il en soit, les conditions extraordinaires des taux d’intérêt, quasi-nuls voire négatifs, imposent de véritables challenges d’allocation aux acteurs du monde assurantiel, soumis à des enjeux spécifiques d’adossement et d’investissement à long terme pour servir leurs engagements auprès des assurés.
De ce point de vue et pour poursuivre la comparaison, le cas nippon est riche d’enseignements. En effet, suite à l’appréciation spectaculaire du yen face au dollar dans les années 80 et dans un contexte de politique étatique encourageant la collecte massive de souscriptions, les assureurs japonais (dont l’actif général comportait massivement des obligations libellées en dollar) ont essuyé de lourdes pertes en capital et ont réalloué leurs actifs en faveur des actions. Ce mouvement, à l’aube de la crise boursière et économique du début des années 90, a conduit à de nombreux rachats de contrats, provoquant la défaillance de huit compagnies d’assurances nippones, à l’image de Nissan Life.
Aujourd’hui, l’effet systémique d’un tel évènement serait sans doute partiellement amorti grâce au cadre instauré par Solvabilité 2, à travers la valorisation « best estimate » du passif et du SCR (Solvency Capital Requirement), qui intègre les options de taux garantis imbriquées, les risques de rachats massifs et les chocs de taux. Pour autant, quelles que soient les normes prudentielles en place, la recherche de produits financiers dans le compte de résultats reste structurellement incontournable pour les assureurs.
Concevoir une « brique » d’allocation assurantielle de rendement, au sein de l’actif général
Après avoir procédé à une diversification assez poussée de leur allocation ces dernières années, vers de nouveaux segments obligataires (crédit high yield, dette émergente) et vers les actifs non cotés, les assureurs doivent ouvrir une réflexion sur la construction même de leur portefeuille : il s’agit désormais de favoriser une meilleure visibilité sur les rendements comptables, plus qu’une quête « à tout prix » de surperformance financière de plus en plus complexe et risquée, tout en gardant la main sur la liquidité. Cette optimisation appelle une modification de la structure générale de l’actif de l’assureur.
En premier lieu, cela passe par une gestion plus dynamique en portage optimisé de l’actif obligataire en direct, et, pour l’assurance-vie et la prévoyance, le rallongement de la duration notamment. L’idée est, sans pour autant bouleverser l’actif général compte tenu de son inertie comptable, de créer une allocation assurantielle additionnelle dans le bilan. Cette » brique » additionnelle doit être construite selon une logique assurantielle, tout en étant une allocation de rendement. Pour cela, nous proposons d’aller capter du rendement sur des titres traditionnels, liquides, au-delà de nos frontières. Ainsi, par exemple, avec une couverture de change efficace via un asset swap, il est possible de capter de précieux points de base de rendements supplémentaires dans le cas de certaines souches d’émissions obligataires…. Notamment émises en yen !
Autre enjeu dans le cadre de cette » brique d’allocation assurantielle de rendement « , circonscrire tout risque de provisions pour dépréciation durable (ou PDD). La solution consiste en une allocation par phase de cycle, pour chaque type d’actifs : autrement dit, déterminer un budget de risque par classe d’actifs sur la base de standards de Value at Risk (VaR), avec la définition de niveaux d’exposition maximum au gré des phases de reprise, croissance, ralentissement ou récession économique.
Enfin, afin de mettre œuvre opérationnellement une telle approche, il est plus efficace pour l’investisseur institutionnel de recourir à une enveloppe de type OPC dans le mandat, pour y loger cette fameuse brique, plutôt qu’une détention en direct au sein de l’actif général. Une structure de fonds dédié offre en effet de nombreux avantages, outre la gestion du risque de passage de PDD : un accès à tous les instruments financiers pour une ligne unique, de moindres contraintes comptables liées aux instruments, l’absence d’appels de marge en direct, un pilotage précis des produits financiers à détacher dans le compte de résultats.
Cette « brique » additionnelle aura donc pour vocation de s’inscrire dans une logique assurantielle de rendement et non de simple performance financière.
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