Comme attendu, le Conseil des gouverneurs a décidé d’abaisser ses taux directeurs de 25pdb, soit le taux de dépôt, le taux de refinancement et le taux de facilité, à respectivement 3.00%, 3.15% et 3.40%. La BCE maintient son approche « data dependant », réunion par réunion et ne s’engage pas à l’avance sur une trajectoire de taux particulière. La BCE a cependant reconnu qu’une politique restrictive n’était plus nécessaire, en supprimant la référence « au maintien des taux directeurs à un niveau suffisamment restrictif, aussi longtemps que nécessaire ». La prochaine étape sera une discussion sur l’estimation du taux neutre.
Ce que l’on retient :
- Le processus de désinflation est en bonne voie et l’inflation devrait ensuite se stabiliser durablement autour de l’objectif à moyen terme de 2% (cf tableau des prévisions); la BCE est de plus en plus confiante sur ses projections d’inflation à moyen terme. La BCE ne se prononce pas sur les risques mais la liste sur les risques haussiers est significative.
- L’inflation domestique, très liée à la hausse des prix dans le secteur des services, demeure élevée à 4.2%, sous l’effet d’importantes tensions sur les salaires et de la poursuite de l’ajustement du prix de certains services.
- La BCE ne semble pas trop inquiète sur la croissance même si elle reconnait que l’activité devrait se renforcer plus lentement que précédemment prévu (cf tableau des prévisions) ; les risques restent orientés à la baisse étant donné le niveau des incertitudes (commerciales et géopolitiques).
- Le marché du travail reste solide et l’emploi a augmenté plus que prévu. Malgré une légère hausse début 2025, le taux de chômage devrait reprendre sa trajectoire baissière et atteindre un nouveau point bas en 2027 à 6.1%.
- La décision d’aujourd’hui a été prise à l’unanimité ; quelques membres ont proposé une baisse plus importante mais la Présidente a clairement sous-entendu que cela ne serait pas approprié.
- La Présidente a mentionné que la BCE avait déjà fait un pas très important en réduisant ses taux directeurs de 100 pdb en 6 mois.
- Il n’y a pas eu de discussion sur le niveau du taux neutre au sein du Conseil lors de la réunion. La Présidente a volontairement éludé toutes les questions autour de ce sujet.
Notre analyse : alors que la tonalité de la déclaration introductive était plutôt « accommodante », la session des Q&A a ouvert la porte sur la prochaine étape, à savoir « le niveau du taux neutre ». C. Lagarde ne se prononce toujours pas sur une estimation du taux dit d’équilibre mais semble reconnaitre qu’il serait plus élevé qu’avant la crise Covid. Le sujet fait l’objet de débat au sein du Conseil notamment entre F. Villeroy de Galhau l’estimant à 2% voire même en-dessous et I. Schnabel l’estimant entre 2.5% et 3.0%. En tenant compte des projections de la BCE d’environ 1.0% de croissance réelle en moyenne sur la période 2024-2027 et de 2.0% en moyenne pour l’inflation, soit une croissance nominale de 3% en moyenne sur la période, un taux dit d’équilibre entre 2.5% et 3.0% serait cohérent. Les anticipations de marchés tablent toujours sur un taux de dépôt en-dessous de 2% à horizon un an (cf graphe) tandis que nous maintenons un taux de dépôt à 2.75% en 2025.

