03 novembre 2025

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Chine : la quête d’hégémonie industrielle et technologique entretiendra les tensions avec les Etats-Unis

Thuy Van Pham
Thuy Van Pham, Economiste

La rencontre entre Xi Jinping et Donald Trump, tenue le 30 octobre 2025, marque une étape majeure dans la relation sino-américaine après plusieurs mois de tensions. Le sommet s’est conclu sur une note globalement positive, débouchant sur l’instauration d’une trêve commerciale d’un an entre les deux économies. Parmi les mesures annoncées :

  • Réduction du taux effectif des droits de douane américains sur la Chine, de 58 % à 48 %, notamment via une baisse de 20 % à 10 % des droits sur le fentanyl (cf. graphique 1). En contrepartie, Pékin s’engage à coopérer davantage sur la lutte contre le trafic de fentanyl. Les modalités restent à définir.
  • Suspension pendant un an de la mise en œuvre de la « règle sur les filiales » américaine et des nouvelles mesures chinoises de contrôle des exportations de terres rares introduites le 9 octobre.
  • Gel des enquêtes américaines au titre de la section 301 concernant les secteurs maritime, logistique et de la construction navale chinoise, accompagné d’une suspension des contre-mesures de Pékin.
  • Reprise progressive des achats chinois de soja américain. Le calendrier et le volume restent à préciser.
  • Suspension d’un an des droits portuaires supplémentaires visant les navires chinois et américains.
Taux de droit de douane effectif (%)
Chine : prix de vente de logements (variations sur un an, en %)


​​​​​​​À court terme, cet accord représente un signal d’apaisement
. Le passage d’un cadre trimestriel à un engagement d’un an réduit les risques d’escalade et rétablit partiellement la confiance sur les marchés. Cependant, cette trêve est fragile. Certes, ni Washington ni Pékin ne souhaitent raviver les tensions coûteuses. La relation bilatérale reste marquée par une méfiance persistante. Sur le fond en effet, les désaccords structurels dénoncés par les États-Unis à l’encontre de la Chine n’ont pas été résolus.

En premier lieu, le modèle de croissance chinois : son rééquilibrage ne progresse que lentement. Si la Chine semble en mesure d’atteindre son objectif de croissance autour de 5 % cette année, cette performance ne provient pas de la demande domestique. Celle-ci reste faible, pénalisée par une crise de confiance persistante et la morosité prolongée du secteur immobilier, deux facteurs qui accentuent les pressions déflationnistes (cf. graphiques 2 et 3). La situation plaide pour un renforcement du soutien étatique, mais Pékin refuse jusqu’à présent un plan de relance massif, préférant des mesures ciblées. Ainsi, l’amélioration du rôle de la consommation n’est pas la priorité première des autorités locales.

En revanche, le moteur externe reste particulièrement dynamique. Les dernières données confirment que les exportations se maintiennent à des niveaux historiquement élevés, malgré une hausse cumulative de 30 % des droits de douane appliquée depuis le début de l’année. Cette résilience s’explique par la double approchemise en œuvre par Pékin pour compenser la baisse des ventes directes aux États-Unis : d’une part, un contournement commercial consistant à rediriger une partie du commerce via les pays de l’ASEAN avant réexportation vers le marché américain, et d’autre part, une diversification géographique, avec une hausse soutenue des exportations vers l’Europe (cf. graphique 4).

Chine : indices des prix (variations sur un an, en %)
Chine : exportations de marchandises (milliards de $)

 

Enfin et surtout, la rivalité de long terme entre les deux puissances demeure. La Chine est en position de force dans plusieurs domaines stratégiques. D’abord, celui des terres rares : le pays assure près de 70 % de la production mondiale, 90 % des capacités de raffinage et près de la moitié des réserves globales. Dans ce contexte, ces ressources sont devenues une arme géopolitique majeure, renforçant le pouvoir de négociation de Pékin face à la forte dépendance américaine (près de 70 % des importations américaines proviennent de Chine).

Ensuite, la Chine a franchi un cap technologique décisif. Grâce au plan « Made in China 2025 », elle s’est imposée comme leader mondial dans plusieurs secteurs (panneaux solaires, véhicules électriques, batteries, graphène) et comble rapidement son retard dans d’autres (machines-outils et robotique, cf. tableau). Pékin ne compte pas s’arrêter dans cette dynamique, bien décidé à consolider son statut de puissance dans les technologies de pointe. Un nouveau plan industriel d’envergure est en préparation, dont le 15ᵉ plan quinquennal (2026-2030) constituera la première étape. L’objectif est clair : renforcer l’autonomie et la puissance nationale, saisir l’opportunité historique offerte par la nouvelle révolution technologique et atteindre une position de leader mondial dans le développement scientifique et technologique (communiqué à l’issue de la 4e session plénière du 20e Congrès du Parti Communiste le 23 octobre 2025).

En conclusion, la nouvelle phase de trêve commerciale entre les Etats-Unis et la Chine marque un apaisement bienvenu. Elle ne signifie pas pour autant la fin des incertitudes. Nous pensons que si les deux parties affichent une volonté de compromis, la rivalité stratégique demeure intacte. Dans ce contexte, une alternance de tensions et d’accalmies au cours de la période de pause est envisageable. Une rupture totale des échanges paraît en revanche peu probable, tant les deux économies sont étroitement interdépendantes.

Chine : évaluation du succès du plan " Made in China 2025 "

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